Maghreb: sale temps pour la liberté de la presse

le 31 octobre 2009 12h21 |
par Dominique Lagarde

Les mauvaises nouvelles continuent de s’accumuler, au Maghreb, sur le front de la liberté de la presse. A croire que ces trois pays du Sud de la Méditerranée avancent à reculons…

Au Maroc, l’ouverture qui avait caractérisé les premières années du règne marque le pas. Vendredi le directeur du quotidien Akhbar Al Youm, Taoufik Bouachrine, et le dessinateur Khalid Gueddar ont été condamnés à des peines de prison avec sursis et à des dommages intérêts pour la très lourde somme de 270 000 euros. Le tribunal a par ailleurs décidé la «fermeture définitive » des locaux du journal. Autant dire son arrêt de mort.

Leur crime ? Avoir publié une caricature d’un cousin du roi, jugée irrespectueuse pour la famille royale. Le Monde du 22 octobre avait été interdit de distribution au Maroc pour avoir reproduit dans ses colonnes le même dessin, le quotidien espagnol El Pais avait connu le même sort le 25 octobre.

Ce n’était pas un bon dessin, le message du caricaturiste était à peu près incompréhensible. Mais il fallait avoir l’esprit bien mal tourné pour y voir un affront tel qu’il ne puisse être lavé qu’en interdisant de facto un journal ! A moins que ce soit, précisément, l’indépendance d’Akhbar Al Youm qui ait été dans le collimateur du makhzen et des juges…

Cette affaire intervient après la mise au pilori, cet été, de l’hebdomadaire Tel Quel« coupable » d’avoir publié un sondage – pourtant très favorable- sur le roi à l’occasion du dixième anniversaire de son règne. Et quelques semaines après d’autres condamnations visant des journalistes qui avaient cru pouvoir enquêter sur la santé du souverain. Même si les « lignes rouges », au Maroc, ne sont plus ce qu’elles étaient, il en reste une, apparemment toujours aussi infranchissable : le monarque, personne « sacrée » selon la constitution et la famille royale.

Le royaume recule régulièrement depuis trois ans dans le rapport annuel sur la liberté de la presse de Reporters sans frontières. Il occupe aujourd’hui la 127ème place (sur 175) et les auteurs notent que ce sont surtout les « amendes exorbitantes infligées aux rédactions » qui pèsent sur la liberté des journalistes.

Cette mauvaise place est cependant meilleure que celles attribuées à l’Algérie et à la Tunisie. Car la situation est pire encore dans ces deux pays.

En Algérie, classée à la 141ème place – en recul de 20 places par rapport à 2008- les procédures contre les médias se sont multipliées ces derniers mois, la censure est devenue monnaie courante.

La Tunisie occupe, elle, sans surprise le 154ème rang. La presse indépendante y est bannie, des sites Internet censurés. Plusieurs journalistes ont été récemment agressés ou molestés par la police. Zouheir Mekhlouf, correspondant du site Internet Assabil est en prison depuis le 26 octobre.

Jeudi dernier c’était au tour de Taoufik Ben Brick, journaliste et opposant déclaré au régime, d’être arrêté après être tombé dans un traquenard.
http://blogs.lexpress.fr/nomades-express/2009/10/maghreb-sale-temps-pour-la-lib.php

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