Agence Tunis Afrique Presse.
Plus d’un demi siècle depuis sa promulgation, le Code du Statut Personnel (CSP), qui a placé la femme sur le même pied d’égalité que l’homme, continue de susciter la polémique et de nourrir un débat qui est devenu encore plus insistant depuis le 14 janvier.
Le CSP, promulgué le 13 août 1956, oeuvre du leader Habib Bourguiba, est un ensemble de textes à caractère social qui s’inspirent des idées des penseurs réformateurs tunisiens dont Tahar Haddad.
Le Code, qui interdit la polygamie et la répudiation organise également les aspects relatifs à l’héritage, la tutelle et l’adoption.
La rue s’interroge en Tunisie sur le bien fondé d’une revendication mettant en cause ces deux acquis en faveur de la femme. Revendication qui semble être «l’émanation des courants salafistes». A l’opposé un appel est lancé par les associations et les laïcs qui réclament l’instauration du principe de parité dans l’héritage.
En Tunisie, l’appel en faveur de la polygamie n’apparaît que dans des commentaires sur les réseaux sociaux ou à travers des slogans lors de manifestations.
Des associations à l’instar des femmes démocrates et de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme, pour leur part, appellent à la parité dans l’héritage.
Aucune partie ne s’est proclamée officiellement pour ce débat, a soutenu Salem Labyadh, spécialiste en sociologie politique. Cette polémique ne dépassera pas le cadre d’un débat intellectuel et de propagande politique, a-t-il dit ajoutant que la révision des dispositions du CSP est une question complexe qui implique une mutation radicale du modèle de société.
Aux dires de M. Labyadh, la société tunisienne n’est pas prête pour discuter sérieusement cette question en raison de la conjoncture actuelle et des priorités qui se posent.
La question de la polygamie ne figure pas dans le programme du mouvement Ennahdha, a assuré pour sa part la représentante du mouvement Ferida Laabidi. Il s’agit, dit-elle « d’Ijtihad à propos d’un fait autorisé ». La priorité aujourd’hui, a-t-elle encore renchérit, est de faciliter le mariage des jeunes.
En fait, l’Ijtihad en rapport avec l’institution du mariage est une question qui revient au débat depuis neuf siècles, précise l’anthropologue des religions enseignante à l’Université Ezzitouna Iqbal Gharbi. Elle cite à cet égard le contrat de mariage kairouanais qui permet à la femme de poser comme condition à son mari l’interdiction de la bigamie.
Les Tunisiens ont toujours été organisés par des lois qui reflètent plus ou moins la parité, explique de son côté, la présidente de l’association des femmes démocrates Ahlem Belhaj. Elle estime que la société a atteint un certain niveau qui commande qu’ils se doivent de préserver certains acquis. Le CSP continue de consacrer une certaine forme de discrimination à l’égard de la femme, dit-elle dans une allusion à la question de l’égalité dans l’héritage.
Les Tunisiens en quête, depuis le 14 janvier, d’un modèle de société consensuel ne trouvent pas une réponse auprès des 104 partis légalisés. A deux mois des prochaines élections de la Constituante, ces derniers tardent à afficher leurs programmes et visions concernant le projet de société.
Pour Maya Jeribi, secrétaire générale du Parti Démocratique Progressiste il est temps aujourd’hui de moderniser le Code et de réduire l’écart entre le législatif et la réalité.