Pour l’ajustement du cheminement de la justice transitionnelle.

Tunis, le 16 avril 2018

Des organisations non gouvernementales réclament l’ajustement du cheminement de la justice transitionnelle pour réaliser la transition démocratique et consolider de l’Etat de droit

L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a voté le 26 mars 2018 contre la prorogation du mandat de l’Instance Vérité et Dignité en présence de 70 députés seulement alors que plusieurs groupes parlementaires se sont absentés. Les séances plénières ont vu des débats houleux et un échange d’insultes et d’accusations entre les partisans de la prorogation et les opposants à cette prolongation. Les Tunisiens ont remarqué à la télévision et sur les réseaux sociaux des positions honteuses qui témoignent non seulement des tiraillements politiques profonds mais aussi de la crise éthique chez certaines élites politiques.

Les organisations signataires mettent en garde contre le danger de voir perdurer l’absence d’une volonté politique pour faire aboutir le processus de la justice transitionnelle chez plusieurs partis qui ont vu le retour en force des symboles de l’Ancien Régime et qui tablent sur l’oubli du passé avec tous ses drames et toutes violations pour occulter la vérité. Cela s’est manifesté à travers la mise en place d’une justice transitionnelle parallèle avec la promulgation de la « loi de la réconciliation administrative » ou à travers les obstacles placés devant l’Instance Vérité et Dignité comme l’empêchement à accéder aux documents et aux archives et ce, dans une violation flagrante de la constitution tunisienne dont l’article 148 fait obligation à l’Etat tunisien de mettre en œuvre le processus de la justice transitionnelle dans tous les domaines.

L’Instance Vérité et Dignité s’est, de son côté, impliquée, sur la base d’accords partisans et politiques étroits, dans des querelles secondaires et des conflits entre ses membres entraînant la démission ou le limogeage de certains d’entre eux, ce qui a affaibli son rendement et a entravé le parcours de la justice transitionnelle. Par ailleurs, le non-respect par cette instance des décisions rendues par le Tribunal administratif dans de nombreuses affaires et son entrée en conflit avec la société civile dans de nombreux dossiers, parmi lesquels celui du stockage de ses documents auprès de parties étrangères, ont porté préjudice à sa crédibilité auprès de l’opinion publique, ont mis en doute l’efficacité de son travail et ont contribué à faciliter le travail de sape des détracteurs du processus de la justice transitionnelle.

Pour toutes ces raisons, il importe aux organisations signataires d’exprimer :

leur vive dénonciation des tentatives nombreuses qui visent à enterrer le processus de la justice transitionnelle et à fermer les yeux sur les injustices et les crimes commis durant des décennies de despotisme politique,
leur attachement à l’obligation de découvrir la vérité, d’obtenir une réparation pour les victimes et de garantir que les drames du passé ne se répètent plus afin de réformer les institutions et de consolider l’Etat de droit.

Dans leur souci de surmonter le problème en suspens, les organisations soussignées appellent à l’attachement à la loi de la justice transitionnelle et à un réexamen rapide de la composition de l’instance, à même de garantir la présence en son sein de compétences nationales dont l’intégrité, la neutralité et l’indépendance totale sont reconnues.

Elles exhortent les différentes forces politiques et la société civile à consolider la justice transitionnelle et à la préserver des tentatives visant à lui porter atteinte ou à la détourner de sa trajectoire ou à la vider de son contenu ou de ses nobles objectifs et, à leur tête la réconciliation nationale totale.

Les organisations signataires :

Association Démocratique des Tunisiens en France ( ADTF)

Association des Tunisiens de l’Isère, Citoyens des Deux Rives (ATI, CDR)

Association des Tunisiens du Nord de la France (ATNF, Lille)

Association Tunisienne de Défense des Valeurs Universitaires (ATDVU)

Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse (CTLP)

Collectif 3 C

EuroMed Droits – Bureau de la Tunisie

L’Association Vigilance pour la Démocratie et l’État Civique

Le Comité pour le Respect des Libertés et les Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT)

Le Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux (FTDES)

l’Organisation 23 – 10 pour la Promotion de la Transition Démocratique

Organisation Contre la Torture en Tunisie (OCTT)

Réseau Euro-Maghrébin Citoyenneté et Culture( REMCC)

Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT)

Union des Tunisiens pour l’Action Citoyenne (UTAC)

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