La lutte de la population du bassin minier de Gafsa continue… et s’élargit à d’autres régions !
La politique du pire vient encore de tuer : un véhicule de la garde nationale pourchassant de jeunes manifestants a mortellement heurté le jeune Nabil Chagra, Haytham Smadah a été plongé dans un coma profond pendant deux jours à la suite des coups de matraque répétés qu’il a reçus sur la tête et au visage.
Le mouvement social qui secoue le bassin minier de Gafsa depuis le début du mois de janvier 2008 continue à faire tâche d’huile. La mobilisation s’étend aux villes limitrophes du gouvernorat de Kasserine qui connaît à son tour des manifestations contre la détérioration des conditions de vie et un chômage endémique. Les populations de cette région ne cessent d’exprimer leur ras-le-bol des politiques antisociales qui hypothèquent l’avenir de la jeunesse, avec ou sans diplômes.
La révolte sociale qui a commencé dans le bassin minier depuis le début de l’année ne cesse de prendre de l’ampleur : après Redeyef et Oum Larayes, le mouvement a gagné Metlaoui qui a vécu tout au long de la semaine dernière au rythme des manifestations de rue et des sit-in organisés par les chômeurs de la ville. Les autorités ont répondu comme à leur habitude par la répression. L’aveuglement et l’absence de volonté de négociation de la part des autorités locale et nationale avec les représentants des mouvements sociaux pour sortir de la crise sont patents. En attendant, ces régions oubliées du « miracle tunisien» s’enfoncent depuis des décennies dans la désolation et le chômage qui atteint des taux encore plus élevés par rapport au reste du pays. La révolte populaire est venue crier cette vérité et mettre au grand jour la grande illusion des « politiques d’investissement » affichées par le régime.
L’option sécuritaire et le recours systématique à la violence face aux manifestants ne cessent de faire des victimes : après la mort, le 6 mai 2008, de Hichem Ben Jeddou, un autre jeune homme, Haytham Smadah a été plongé dans un coma profond pendant deux jours à la suite des coups de matraque reçus sur la tête et au visage. La politique du pire vient encore de tuer : lors d’une manifestation de rue, lundi, 2 juin, un véhicule de la garde nationale pourchassant de jeunes manifestants a mortellement heurté le jeune Nabil Chagra, qui, bléssé, gisait par terre à cause d’une collision avec un autre véhicule qui précédait celui de la garde nationale.
La contestation et les affrontements s’élargissent à d’autres régions comme la ville de Fériana dans le gouvernorat de Kasserine où, encore et toujours, face à la colère des manifestants, seule la brutalité policière semble être la réponse du régime tunisien.
Dans cette ville, où le chômage bat des records, un rassemblement pacifique organisé par les chômeurs le 2 juin s’est heurté aux interventions des forces de police. Auparavant, les milices du parti avaient agressé et roué de coups le syndicaliste et responsable du PDP, Atef Zaïri qui a été transféré à l’hôpital dans un état critique. La confrontation entre les manifestants et les forces de police qui ont eu recours aux bombes lacrymogènes a duré toute la journée du lundi 2 juin 2008.
Nous tenons à présenter nos condoléances à la famille et aux proches de Nabil Chagra.
- Nous renouvelons notre soutien aux revendications urgentes et légitimes de la population de ces régions et déplorons l’absence de volonté gouvernementale de négociation avec les acteurs de ce mouvement – jeunes, travailleurs, chômeurs, veuves de mineurs, handicapés du travail – afin de trouver des solutions justes et sortir d’une situation qui devient chaque jour plus explosive.
- Nous exigeons que cessent les brutalités policières ainsi que l’encerclement des villes minières par les forces de police.
- Nous réclamons l’arrêt des poursuites contre les manifestants.
- Nous dénonçons le réflexe sécuritaire comme seule politique face aux revendications sociales, la violation du droit de grève et de rassemblement garantis par la constitution tunisienne et l’omerta médiatique autour de ces évènements.
- Nous exigeons l’ouverture d’une enquête indépendante sur les circonstances qui ont conduit à la mort tragique des deux jeunes manifestants : Hichem Ben Jeddou et Nabil Chagra,
- Nous appelons toutes les forces politiques, syndicalistes et associatives à soutenir les populations en lutte contre la misère, la discrimination et la répression, pour le droit au travail et à des conditions de vie dignes.
Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa
Paris, le 3 juin 2008