Le pavé de Sciences-po Paris dans la mare électorale de Ben Ali, CACOPHONIE AU SOMMET DE L’ETAT Quelques francs-tireurs tunisiens de l’Institut de Sciences politiques de Parie (IEP-Paris) ont plongé l’Etat tunisien dans un désarroi invraisemblable, qui a culminé avec le limogeage surprise et quasi sans précédent du ministre de la communication.
Tout a commencé mardi 7 octobre par une intervention de Borhène Bseyes, loubard arrogant de la nouvelle génération des arrivistes arrivés autour du vieillissant potentat de Tunis. Profitant d’un temps d’antenne intitulé « Spécial de Tunisie » (Khass min Tounis) sur la chaîne satellitaire libanaise ANB, il l’a consacré exclusivement à la journée Tunisie programmée à l’IEP ce samedi 10 octobre.
On peut résumer ce propos comme suit : La Tunisie s’apprête à vivre une fête électorale où le peuple va jouir de son droit à élire ceux qui le gouvernent. Certes, certains crie avec les crieurs qu’on avait invalidé leurs listes pour les législatives, mais ceux-là sont eux-mêmes convaincus que l’on n’a éliminé que les listes invalides au regard de la Constitution. D’ailleurs certains ont fait exprès de présenter des listes comportant des éléments ne jouissant pas de leurs droits civiques… C’était pour embarrasser l’Etat .. Et l’on apprend que certains préparent une journée à l’IEP de Paris samedi, comme par hasard à la veille du coup d’envoi de la campagne électorale, avec juste l’intention de la parasiter.
Ceux qui participent à cette manifestation sont des gens qui appellent l’Etranger à leur rescousse, qui se renforcent par l’intervention extérieure. Pourquoi ne viennent-ils pas se réunir au pays ? Parce qu’il ont pris le parti de l’hostilité à leur pays… C’est un groupe de gens hétéroclite allant des communistes tenant de la dictature du prolétariat aux gauchistes et aux tenant du terrorisme ayant trouvé refuge en occident… Ils sont à la solde de l’Etat français ou plus précisément de certains de ses tenants.
Leur objectif est de parasiter l’événement électoral… Dans l’attente de vous retrouver demain, nous vous tiendrons au courant de ce qui va se passer samedi. Fin de l’intervention vers 22h43 » Le lendemain, mercredi 8 octobre, il récidive sur le même créneau horaire. Cette fois, il entreprend de régler les comptes des opposants participant à la manifestation de l’IEP un à un. Et ce fut le tour de Dr Mostafa Ben Jaâfar, président du FDTL. Résumé : « Cette manifestation qui se prépare à Paris et à laquelle des partis politiques tunisiens – enfin… « parti » sous-entend qu’il y ait des membres, des activités régulières, la présence dans la société… Or, il s’agit en l’occurrence le plus souvent d’un individu ou tout au plus d’une poignée d’individus – qui ont donc prêté le flanc à cette manœuvre. Certains sont même malheureusement officiellement reconnus en Tunisie, dont le FDTL de Dr. Mustafa Ben Jaâfar, qui s’était éloigné de ces cercles suspects avant de s’en rapprocher à nouveau dernièrement. Or, l’Etat tunisien a agréé des candidatures présidentielles et en a rejeté d’autres, dont celle de M. Ben Jaâfar. Ce dernier crie à l’injustice et à la manipulation, mais à y regarder de près, le Conseil constitutionnel n’a fait qu’appliquer la loi : Celle-ci exige que le candidat soit élu président de sa formation, ce qui n’a jamais été le cas de M. Ben Jaâfar… En 1994, il a réuni des individus et a proclamé la création d’un FDTL dont il s’était autoproclamé président. Il n’a donc jamais été question d’élections… Nous assurerons le suivi de ces questions quotidiennement dans « Spécial de Tunis » (Khass min Tounis) A demain ! Le lendemain, vendredi 9 octobre, à la même heure, curieusement, on assite à une rediffusion de l’émission de la veille… Samedi matin à l’IEP, on observe l’arrivée d’officiels, dont le Mustachar (sénateur de pacotille) Ridha Mellouli. Or, ce dernier s’éclipse sur le bout des doigts au bout d’une bonne demi-heure pendant laquelle on attendait l’arrivée du bien-nommé Hédi Mechri, comme autre représentant du pouvoir dans ces assises. Mellouli ne reviendra jamais et Mechri ne donnera aucun signe de vie alors qu’il se trouve bien à Paris selon des informations sûres. Aucun des deux ne se donnera la peine de prévenir des organisateurs soucieux d’assurer l’équilibre entre le pouvoir et ses opposants. Dans les soutiens connus au gouvernement, ne subsiste donc que Mezri Haddad, qui fait un numéro digne de la pire barbouze, mais qui n’en semble pas moins gêné par des coups de fil répétés. Cet acolyte de Borhène Bseyes semble avoir refusé l’ordre de quitter les lieux. Et pour cause : il imprimera à la fin de la manifestation, qui s’est globalement bien déroulée, un air de pugilat en se levant et en se rapprochant de la tribune où se trouvaient les organisateurs, tout en accaparant le micro face à un Sélim Ben Hassen qui lui lançait flegmatiquement : « Ce n’est pas élégant… » Le matin même, on apprend le limogeage de Rafaâ Dekhil, ministre de la communication, maître d’œuvre des opérations de relations publiques à l’étranger.
Borhène Bsayes disparaît des écrans de l’ANB avec armes et bagages, samedi 10 octobre, au moment où il avait promis aux téléspectateurs d’être là pour les informer sur le complot parisien de l’IEP… Il ne réapparaîtra pas non plus dimanche soir au moment de la rédaction de ce compte rendu. Il est fort possible qu’on ne le reverra plus pavoiser sur l’ANB aux fais du contribuable tunisien. Par suite, on peut estimer raisonnablement que le ministre et ses exécutants sont sinon en disgrâce, du moins rudement secoués pour leur gestion de l’affaire Sciences-Po, dont même les organisateurs ne pouvaient prévoir autant d’impact sur le gouvernement et sur la campagne électorale officielle qui s’annonçait.
Le courant opposé à la participation gouvernementale, probablement mené par le ministre des affaires étrangères Abdelwahab Abdallah, a fini par l’emporter. Car la présence éphémère des officiels et leur désertion en catimini montrent à l’évidence qu’il y a eu ordre et contrordre, âpre donc duel entre deux lignes, dont l’une semble avoir remporté une bataille et l’autre avoir gagné la guerre…
Les Tunisiens de l’IEP auront réussi – peut-être malgré eux – la gageur d’apporter un moment de suspens et d’originalité hors des sentiers battus, à cette campagne dont le déroulement et les résultats sont connus de tous à l’avance.
Khaled