Affaiblie, l’Autorité palestinienne cherche dans des promesses d’élections la légitimité qui n’est plus sienne. Mais si cet affaiblissement la pousse à organiser ces élections il pourrait aussi conduire à ce qu’elle les perde. Faisant in fine des islamistes palestiniens les grands gagnants de la révolte des peuples arabes.
Alors que le vent de la révolution souffle dans nombre de pays limitrophes et voisins, l’Autorité Palestinienne a peur d’en être la prochaine victime.
Privés d’élections depuis cinq ans, les palestiniens de Cisjordanie ont eu la surprise d’apprendre, qu’au miracle, ils auront droit à des élections d’ici peu. Et bousculée par l’histoire les dirigeants palestiniens ont eu la promesse facile.
Mahmoud Abbas a annoncé que d’ici à Septembre les palestiniens de Cisjordanie viendront aux urnes pas moins de 3 fois. On leur promet de nouvelles élections municipales, de nouvelles élections législatives, et même des élections présidentielles. Pour tuer dans l’œuf tout soulèvement éventuel la promesse d’un nouveau gouvernement a été faite.
Même si ces élections n’augurent pas d’une victoire assurée au Fatah, le parti d’Abbas, elles auraient, parait-il, le mérite de pouvoir redonner un tant soit peu de légitimité au parti de feu Yasser Arafat.
Un président très affaiblit Car s’il est un leader arabe qui est affaiblit c’est bien Mahmoud Abbas.
Tout d’abord par l’âge, l’homme a eu 76 ans le 26 mars dernier. Presque un jeune homme au regard de l’âge d’autres leaders arabes, diront certains. Mais tout de même !
Ensuite par son bilan politique, osons le dire calamiteux. Abbas a tout misé ou presque sur les Etats-Unis dans son rapport de force avec Israël. Selon lui, Barack Obama aurait pu se montrer suffisamment ferme et équitable contre Benyamin Netanyahou. L’élection en fanfare du candidat démocrate le laissait présager, pensait-on du coté de l’Autorité Palestinienne.
Echec de ce coté-ci, les discussions avec Israël sont aujourd’hui au point mort. Pire Obama s’est résigné à ne rien dire au gouvernement israélien dans sa politique de colonisation de la Cisjordanie.
Sur nombre d’autres dossiers Abbas ne peut se prévaloir que d’une suite de concessions sans guère de triomphe en retour. En effet Abbas s’était montré assez courageux sur certains dossiers sensibles comme la question du partage de Jérusalem ou l’épineux problème des réfugiés. Malgré ça aucun résultat probant n’est venu renforcer son bilan.
Mais le véritable affaiblissement d’Abbas est à chercher du coté de l’Egypte. Abbas fut le dirigeant arabe le plus jusqu’auboutiste dans son soutient indéfectible à Hosni Moubarak.
Plus compromettant pour l’Autorité Palestinienne. Sa police alla jusqu’à interdire toute manifestation de soutien au soulèvement égyptien, lorsque celui-ci avait lieu.
Abbas avait poussé l’allégeance à Moubarak si loin qu’on peut même dire que rien ne se décidait en Cisjordanie sans l’aval égyptien. « Lâchée» par les Etats-Unis, l’autorité Palestinienne pensait trouver dans l’allié égyptien l’interlocuteur de poids à s’adjoindre dans son rapport de force inéquitable avec Israël. Son attitude docile à son égard le démontre.
Des élections risquées
Mais il y a pire que le simple sort du leader palestinien. Il y a l’avenir du peuple palestinien dans son ensemble. Séparé en deux entités, la Cisjordanie et Gaza, ce dernier bénéficie d’un peu de liberté dans la seule Cisjordanie.
Car le Hamas, qui a gagné haut la main les législatives organisées à Gaza en 2006, a prévenu. Lui ne fera aucune élection, révolte arabe à ses portes ou pas. Du coté de Gaza aucun changement à espérer donc.
A terme le risque est donc bel et bien celui d’une Cisjordanie où le Fatah perd les élections à venir. Vu son affaiblissement c’est parfaitement possible. Vu également la pauvreté de l’offre politique palestinienne, si le Fatah perd, c’est presque à coup sur contre une offre politique de nature islamiste.
Ainsi est le paradoxe palestinien en ces temps de libertés arabes. Une libéralisation des pratiques politiques pourrait, à terme, amener au pouvoir des partis assez peu soucieux de liberté dans le seul espace où les palestiniens avaient, encore, un peu de libertés.
La crainte d’une révolution accaparée par les islamistes, qui s’était levée lors des révoltes tunisienne et égyptienne, pointe, ainsi dangereusement en Palestine.
A moins que les élections promises par Abbas ne soient qu’un rideau de fumée. Dans tous les cas le sort politique des palestiniens restera sombre.