LES ÉTATS GÉNÉRAUX DU SERVICE PUBLIC,

Des salles de classe avec des enseignants ; des hôpitaux avec des infirmières et des médecins ; de l’eau courante potable et des toilettes qui fonctionnent… Pour des millions de personnes dans le monde ce n’est encore qu’un rêve lointain.

Et pourtant, l’accès à ces besoins vitaux – santé, éducation, eau et assainissement, … – est absolument indispensable pour transformer la vie des personnes qui vivent dans la pauvreté.
Comme pour ce qui s’est passé dans nos pays, il ne peut y avoir de développement, économique et environnemental, sans développement de la démocratie, de services publics performants et accessibles à tous et partout.
Or, tant dans les pays pauvres que dans les pays riches, il se trouve que ce concept est devenu insupportable pour les conservateurs et les néolibéraux; pour eux, tout service est marchand et doit être soumis à la concurrence. C’est le sens de l’Accord Général sur la Commercialisation des Services(AGCS) qui fait partie des accords constitutifs de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Cet accord stipule que « l’AGCS s’applique en principe à tous les services, à l’exception de ceux qui sont fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental ». Ce sont les objectifs des Plans d’Ajustement Structurels du FMI qui reposent tous sur la baisse des dépenses publiques, des salaires et des retraites.

C’est une offensive de grande ampleur qui a été menée depuis une trentaine d’années contre l’exercice et le concept même de service public. Offensive idéologique visant à démontrer la supériorité du « marché » face à l’inefficacité du service public, son manque de souplesse, les privilèges des fonctionnaires, la gabegie de l’argent public et le trop d’impôts. D’où les privatisations, délégations à des groupes privés, le plus souvent multinationaux, les financements bancaires de type Partenariat-Public-Privé(PPP). Généralisation du New Public Management (et sa version française la RGPP), à travers les baisses d’impôts, les réductions d’effectifs, l’évaluation et les contractualisations. Offensive contre le statut des fonctionnaires…
L’Union Européenne, qui aurait du jouer un rôle protecteur vis-à-vis de ses peuples et promouvoir des services publics européens, a fait tout le contraire en privilégiant la concurrence libre et non faussée. L’Intergroupe Services Publics, constitué dans l’orbite du Parlement Européen, vient de dresser un constat sans appel :
« La libéralisation des marchés, appliquée aux services publics depuis les années 1990 a entraîné une mise en concurrence destinée à faire baisser leurs tarifs par une augmentation supposée de leur productivité. En fait, on a obtenu une baisse des effectifs, source de chômage, une détérioration de la qualité des services, sans diminution des tarifs, car on a eu affaire à des secteurs quasi monopolistes, incapables par nature de faire jouer la concurrence (ex.: l’énergie). La crise n’a fait que confirmer l’incapacité des «forces du marché» à traiter ce problème et celle des pouvoirs publics à faire face aux besoins de relance. Le recours généralisé au Partenariat Public Privé, prévu pour suppléer cette carence, apparaît comme un leurre qui entraînera une réduction du champ de ces services et de leur action, au détriment de la cohésion sociale et territoriale et des valeurs de solidarité, propres au modèle européen. La politique suivie par la Commission Européenne (CE) et la Cour de Justice ne fait qu’entretenir un sentiment de doute sur l’intérêt porté à la spécificité de ces services. Enfin on ne peut que constater l’attentisme de la CE pour définir, par voie de directive ou par tout autre moyen juridique, un statut du Service d’intérêt général, qui le distinguerait de la loi du marché »

Face à cette offensive de grande ampleur, de nombreuses luttes sociales ont eu lieu et se poursuivent, relayées par les forces politiques de gauche, dans de nombreux secteurs : La santé, l’éducation, la Poste, la petite enfance, le logement, les transports, etc. Ces luttes sont très souvent menées par les agents des services publics en question (ce qui permet aux conservateurs de les qualifier de « corporatistes »), et, encore insuffisamment, par les usagers.

La crise financière, économique, sociale et environnementale mondiale que nous connaissons a encore exacerbé les tensions et les conflits et a remis en exergue l’importance de l’intervention publique, tout en faisant la démonstration de l’inefficacité et du coût (écologique, économique et social) du « libre marché ».
C’est dans ce contexte qu’en France des syndicats, des associations et de mouvements politiques de gauche se sont réuni pour mener ensemble une démarche novatrice d’organisation des États Généraux du Service Public.

L’objet de ces États Généraux est d’ouvrir un vrai débat de société sur le Service Public moderne, de fournir des argumentaires et des outils à tous ceux qui luttent pour sa sauvegarde et de tracer un cadre de référence pour son évolution et son développement au 21ème siècle dans le sens d’un intérêt général réaffirmé.

La démarche adaptée à consister à se mettre en réseau avec des collectifs locaux déjà constitués ou nouvellement créés de manière à prendre toute la mesure des initiatives et des attentes. En parallèle, les organisations membres ont entrepris d’approfondir ensemble quatre thématiques centrales intersectorielles :
1. Quels champs et quelles missions pour le Service Public ? A quels niveaux territoriaux et selon quel mode d’exercice ?
2. Comment associer la population, les personnels et les élus à une gestion démocratique des services publics ?
3. Comment les financer, en fonction de leur nature, des usagers concernés et des objectifs sociaux visés ?
4. Quels rôles spécifiques les agents publics chargés de fournir ces services sont-ils appelés à jouer pour prendre en compte l’intérêt général et l’égalité d’accès ? Quels statuts en découlent ?
Ces quatre thématiques ont fait l’objet de premières contributions, de premiers travaux et questionnements.
Vous trouverez ci-après, quatre fiches de trois pages chacune faisant le point sur l’état des travaux soumis à discussion pour les EGSP . Ils feront l’objet d’un large débat les 11 et 12 décembre à Orly.
En effet, les réponses à apporter sont complexes et des discussions approfondies sont nécessaires, du fait de la diversité de ces composantes.
Cette étape, essentielle, sera suivie d’autres, définies en commun, car l’ambition de la démarche est grande : Remettre le Service Public au cœur d’une Refondation Sociale, au centre du débat public.

Le Comité national
10 octobre 2010

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *